Une longue lignée de bâtisseurs
Lors de ma visite chez Lucie Laventure, j’ai été impressionnée par la magnifique maison qu’elle habite avec son époux Michel Grenier. On arrive difficilement à s’imaginer que cette somptueuse demeure fut d’abord, en 1895, un hangar à grain. Albert Bourassa l’acheta en 1923 et le transforma en habitation. En 1925, Sergias Laventure, le grand-père de Mme Laventure, en devint à son tour propriétaire. Par la suite, en novembre 1975, Mme Laventure et M. Grenier en prirent possession. Le couple originaire de Saint-Ours avait auparavant vécu à Montréal et à Longueuil à cause de leurs emplois respectifs. Cependant, ils retournaient dans leur village natal le plus souvent possible. «Dès que je revoyais la rivière Richelieu, je me sentais chez moi», évoque-t-elle.
M. Grenier a consacré 13 ans aux travaux minutieux de restauration en portant attention aux moindres détails. Il a ouvragé avec finesse une variété d’éléments, tels que des arches avec clé de voûte et des impressions de motifs sur verre. Ceci procure un charme irrésistible à cette demeure ancestrale. De son côté, Mme Laventure s’est grandement investie dans divers organismes du milieu. Depuis 22 ans, elle est responsable de la bibliothèque où elle a déjà organisé des conférences sur l’histoire de la musique. Elle indique qu’à Saint-Ours, la culture est bien présente. Durant les années 1980, elle contribuait à l’accueil des nouveaux arrivants en les recevant à déjeuner. «Ici, on prend le temps de vivre.»
Un lieu familier
À l’arrière de la maison se trouve un bâtiment de style boomtown construit par Sergias Laventure et recouvert de tôle embossée. Il servait de boutique de ferblanterie pour le grand-père et le père de Mme Laventure qui exerçaient tous deux le métier de ferblantier.
Ils fabriquaient entre autres des plafonds en métal gaufré très populaires à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. D’ailleurs, plusieurs édifices de Saint-Ours possèdent ce type de plafonds en tôle ornée de divers motifs installés par les ferblantiers Laventure. De nos jours, la boutique est devenue l’atelier du couple.
Une maison qui parle
Les pièces de cette demeure sont harmonieusement assemblées, car elles comportent certains motifs et matériaux communs. Le rez-de-chaussée, aux nombreuses fenêtres, forme une aire ouverte lumineuse avec une vue imprenable sur la cour. Les plafonds en tôle gaufrée de la salle à manger et du salon montrent le travail fignolé et précis du grand-père ferblantier. «Ma mère disait que la maison parlait. Effectivement, on sent une présence ici, car elle a été habitée par des gens qui l’ont beaucoup aimée», conclut Mme Laventure.
L’âme du foyer
«Michel et moi désirions vraiment avoir un foyer. Lorsque la boulangerie du village a fermé ses portes, nous avons acheté 5000 briques provenant du four à pain. Nous avons dû faire plusieurs voyages en auto pour les transporter jusqu’à la maison. Elles ont servi à la fabrication du foyer. La tablette est faite en pin provenant de gros billots qui avaient flotté pendant 60 ans dans les eaux des écluses. Mon beau-père les a récupérés en chaloupe. Puis, on les a apportés dans la grange pour les faire sécher. Michel a ensuite réalisé la tablette à partir de ce bois. Ce sont donc tous des éléments récupérés et transformés qui ont été utilisés. Il y a du vécu dans ce foyer. Il en a long à raconter.»
Un legs précieux
Lorsqu’elle était enfant, sa grand-mère, constatant qu’elle y était grandement attachée, affirmait qu’un jour Lucie reprendrait la maison. «Nos enfants aussi sont liés à cette demeure. Ce trésor familial chargé de souvenirs sera sûrement conservé par eux à leur tour.»
Crédit photos: Philippe Manning
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