Il y a quelques jours, la toile a explosé d’articles sur une femme qui en serait à son dix-septième mois de grossesse. Cette habitante de la province du Hunan en Chine, aurait trotté jusqu’à l’hôpital et demandé, non pardon, aurait exigé une césarienne, qui lui aurait été refusée. Cette information a été relayée par des médias très sérieux du monde entier, avec des explications on ne peut plus saugrenues…
Et bien, laissez-moi vous dire que ce n’est tout simplement pas possible de dépasser le terme d’une grossesse de plus de quelques jours. Le placenta, qui est une sorte de poche assurant les échanges entre le fœtus et la mère, est programmé pour une vie de neuf mois. Il évolue avec les différents stades de développement et lorsqu’arrive le jour de l’accouchement, il sera expulsé tout de suite après la naissance du bébé. Si la nature a établi une durée de neuf mois pour un développement humain, c’est qu’il y a certainement une raison. Au-delà de cette période et si l’accouchement n’a pas eu lieu, on surveille attentivement les mouvements du fœtus à l’intérieur de l’utérus ainsi que son rythme cardiaque. On vérifie qu’il n’y ait pas de souffrance fœtale, que le bébé continue de bien bouger, qu’il n’y ait pas de saignements de la mère. Lorsque les conditions optimales sont réunies, on peut autoriser un dépassement de quelques jours avant de déclencher l’accouchement. Plus on attend après la date prévue de sortie, plus les risques de souffrance (mais aussi de décès) augmentent pour le bébé, avec une diminution des échanges avec le placenta qui est l’organe qui permet au fœtus de se nourrir, de « respirer ».
À aucun moment et dans aucune histoire de la médecine, on n’a pu voir une grossesse qui se prolonge aussi longtemps. De rares cas de dépassement de terme de quelques semaines ont été rapportés. C’était dans les années 1940 ou 1950 avant l’avènement de l’échographie, laquelle permet de dater la grossesse avec une bien meilleure précision que l’arrêt des règles, ou un test de grossesse. Il faut savoir que lorsque l’on s’aperçoit que l’on n’a plus ses règles et même si elles ont l’exactitude d’une horloge suisse, elles ne déterminent pas la date de la fécondation et donc pas la date exacte de l’accouchement.
Alors pourquoi ce gag d’une pseudo-grossesse de 17 mois? Probablement pour créer le buzz. On ne sait même pas si cette femme existe, et même si c’est le cas, on a lu qu’elle a refusé toute échographie. Elle a beau avoir présenté un document certifiant qu’elle devait accoucher en novembre 2015, cela ne prouve rien si ce n’est qu’elle a peut-être eu une interruption de grossesse (fausse couche ou autre) et c’est là sa deuxième grossesse, laquelle durerait bien neuf mois…
En tout cas tout cela nous permet d’avoir au moins une certitude : toutes les informations que vous lisez sur le net sont toujours à vérifier, deux fois plutôt qu’une … et ne me regardez pas comme ça…
Vous pensez que je ne vous vois pas en train de vérifier que je ne vous ai pas raconté des histoires ?
(Consultation avec le Pr Philippe Deruelle)
Source photo : Shutterstock
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